mardi 5 avril 2011

Tuesday self portrait (en petite forme)

"L'impatience est folle, on le sait. Elle croit possible la télétransportation, elle prétend que ce n'est qu'une question de temps, qu'à trois générations d'ici nous n'aurons qu'à songer à un ailleurs précis pour disparaître dans un éclair bleu. 
Elle compte les heures et les jours. Si j'avais en vue quelque réjouissance (ou simplement un truc spécial à faire, pas spécialement enthousiasmant mais pas débilitant non plus), je comptais pour rien le temps qui m'en séparait, ne lui accordais pas même un regard, une minute d'attention. C'était un temps de second choix, de la qualité ordinaire, je n'allais pas m'abaisser à ça. 
Mis en veilleuse comme une bouilloire ou un écran mais sans réaliser, hélas, la moindre économie d'énergie, je dressais un voile gris entre moi et le monde sur quoi tout rebondissait, l'attente, considérais sans me troubler des jours et des heures nuls, sacrifiés, pis-aller. Je savais que c'était un péché, qu'une âme forte et élevée devait voir chaque seconde comme une adorable, une inestimable chance qui ne revenait jamais. J'ai attendu que cela passe, cela étant, des mois entiers. Quelle forme dessinaient ces pics d'intensité que je reliais entre eux comme points numérotés dans un désert d'insignifiance ?"
Didier da Silva/François Matton. Une petite forme

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