De même que, après être allée à un concert, je me repasse tous les disques de l'artiste les jours suivants, j'ai relu de nombreuses pages de Javier Marias après avoir assisté à sa rencontre.
Quant à la carte qu'il m'envoya en réponse à celle que je lui avais écrite, je ne vis tout d'abord pas la nécessité de la relire : je me souvenais parfaitement de son message, de son français presque parfait, de ses salutations en espagnol. J'étais capable également de retracer l'emploi du temps de la matinée où je l'avais reçue, capable de dire qu'il faisait beau, ce jour de la fin juin 96.
Quand, tout à coup, je m'aperçus qu'une chose s'était totalement et irréversiblement évanouie de ma mémoire (et dans le cas des souvenirs enfuis, je sais que me soumettre à la torture serait parfaitement inefficace) : le recto de la carte.
Je ne me précipitai pas, cependant : je passai deux jours à me demander ce que j'allais découvrir en rouvrant l'enveloppe.
Même s'il se dit "écrivain de la boussole et pas du plan", signifiant
ainsi que, s'il sait dans quelle direction son récit s'achemine, il en
découvre les méandres lui-même tandis qu'il les écrit, on peine à croire
que Javier Marias laisse la moindre place au hasard dans ses romans.
Mais dans sa vie ?
S'était-il débarrassé d'une carte qui traînait depuis longtemps sur son bureau ? Ou l'avait-il soigneusement choisie ?
En redécouvrant ce que ma mémoire avait occulté, je n'eus aucune réponse à ma question : hasard ou intention ?
Mais je restai stupéfaite.
2 commentaires:
Parmigianino 1503-1540
Selbstbildnis im Konvexspiegel; um 1523/24
Self-Portrait in a Convex Mirror; c. 1523/24
Das Kunsthistorisches Museum Wien
stupéfaite moi aussi !
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