samedi 13 octobre 2012

Lire dans les villes (1 : à Paris avec Julio Cortazar)

Le matin, dans un appartement parisien près du ciel -le 7ème-
pendant que le pain rôtit,
que l'eau du thé frémit,
écouter Chet Baker,
corner quelques pages.
Il était à peine 10 heures, et je me dis que vers 11 heures j'aurais une bonne lumière, la meilleure qui soit en automne. Pour perdre du temps je dérivai jusqu'à l'île Saint-Louis et me mis à marcher le long du quai d'Anjou, je m'arrêtai un instant devant l'hôtel de Lauzun et je me récitai quelques vers d'Apollinaire qui me viennent toujours à l'esprit quand je passe devant l'hôtel de Lauzun et quand le vent tomba d'un coup et que le soleil devint au moins deux fois plus grand, je m'assis sur le parapet et me sentis terriblement heureux dans cette matinée de dimanche. Des mille façons de combattre le néant, une des meilleures est de prendre des photos, activité à laquelle on devrait habituer les enfants de bonne heure, car elle exige de la discipline, une éducation esthétique, la main ferme, le coup d'oeil rapide. Lorsqu'on se promène avec un appareil photo, on a comme le devoir d'être attentif et de ne pas perdre ce brusque et délicieux ricochet de soleil sur une vieille pierre, ou cette petite fille qui court, tresses au vent, avec une bouteille de lait ou un pain dans les bras.
Julio Cortazar. Les fils de la vierge in Les armes secrètes.

1 commentaire:

  1. Il me semble que tous les week ends, tu lis dans une ville différente, et il y a des trains et du soleil, des photos, du thé, des toits...c'est très beau!

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