Depuis 4 ans que je pratique les tuesday self portraits,
mon appareil photo est devenu
un miroir.
"Je connais mon heure. Sans avoir examiné à la loupe, au compas, au goniomètre, à la lumière rouge, le point de l'écliptique qui se trouvait à l'horizon quand j'ai franchi le néant à pieds joints, je me connais et je me reconnais comme si j'étais un bon billet de banque. Quand je m'invite au restaurant dans le monde ou chez la nuit, je consens, je me laisse faire, mais au fond, je ne marche pas. Je me connais.
Je vis en compagnie d'hommes de mer, d'écrivains pour jazz, d'astronomes, de magnétiseurs, de physiologistes, de marchands de tabac et d'hôteliers. Ce sont mes frères secrets, que hante le même grouillement d'étoiles maternelles.
J'ai un chiffre, un jour, une pierre, un climat, des plats préférés, des poires pour la soif, des allées et venues de prédilection et des vices que je ne confonds pas.
Je me doute un peu que tout était prévu, depuis l'allumeur de réverbères qui chaque soir m'éclaboussait de vieille paille quand je revenais du lycée, jusqu'aux trains qui arrivent en retard, et aux huissiers qui m'attendent comme des sentinelles au tournant des semaines et des années. Tous les censeurs, contrôleurs d'autobus, chauffeurs de taxi soudain en panne, concierges bibliophiles, sont mes compagnons de route, comme les averses inattendues, les rues que l'on ne trouve pas, les peaux de bananes, et les étreintes brusques, longtemps désirées, mais sur lesquelles on ne comptait plus, sont des cadeaux."
Léon-Paul Fargue. Haute solitude.
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