dimanche 11 juillet 2010

Mythologie de l'ours

Ce sont les mots qui m'alourdissent l'épaule.
Ceux des livres ou des carnets que je transporte aux heures de la ville.
Alors, le temps de l'été, je me fais moins nomade et je vais à la bibliothèque.
Les horaires d'ouverture sont à ma convenance y compris le dimanche.
Je pose mon sac, me sers un thé et tourne les pages.
La terrasse aérée fait office de cafet' et les fraises proviennent du marché voisin.
Le temps passe, scandé par les cloches de St Gilles et les avions dans le ciel.
J'ai pris un abonnement -pour juillet.


"Je crois avoir compris une chose, une grande chose. C'est que le bonheur, pour les gens de notre race, est dans l'idée, et pas ailleurs. Cherche quelle est bien ta nature, et sois en harmonie avec elle. "Sibi constet", dit Horace. Tout est là. Je te jure que je ne pense ni à la gloire, et pas beaucoup à l'art. Je cherche à passer le temps de la manière la moins ennuyeuse et je l'ai trouvée. Fais comme moi. Romps avec l'extérieur, vis comme un ours -un ours blanc- envoie foutre tout , tout et toi-même avec, si ce n'est ton intelligence. Il y a maintenant un si grand intervalle entre moi et le reste du monde, que je m'étonne parfois d'entendre dire les choses les plus naturelles et les plus simples. Le mot le plus banal me tient parfois en singulière admiration. Il y a des gestes, des sons de voix dont je ne reviens pas, et des niaiseries qui me donnent presque le vertige. As-tu quelquefois écouté attentivement des gens qui parlaient une langue étrangère que tu n'entendais pas ? J'en suis là."
Gustave Flaubert. Lettre à Alfred Le Poittevin. Mardi 16 septembre 1845

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Oh oui, continuez, vous continuez à lire ces correspondances ici, tous les dimanches, à la bibliothèque on y installe une grande terrasse, des voiles et des sièges, on y fait pousser des fraises, et vous lisez encore une fois l'histoire de l'ours qui se méfiait déjà des formules magiques en 1845 / les étagères si bien réussies - ça c'est du talent.

Pays.