(et ne met pas de gants)
,pas mes vêtements
,
(taille 14 ans)
.(une autophotografiction)
Améliore la concentration et l’équilibre de l’esprit |
Ce que j'aimerais ajouter, c'est que les arbres me font toujours l'effet d'être des danseurs figés dans un beau geste. L'immobilité recèle un moment suspendu. A chaque instant, elle peut se mettre en mouvement, et pour cette raison, elle a quelque chose d'hypnotique.Robert Walser. Le territoire du crayon.
En chemin vers l'arbre, ils croisèrent une famille. C'était une de ces familles qu'on croise le samedi après-midi en forêt, avec trois enfants et une grand-mère précoce, portant sacs et glacières, un père en jogging qui tient le petit sur les épaules, une très jeune mère en escarpins conversant avec la grand-mère qui répond distraitement au nom de mamita ou de mamée, ou tout autre nom dérivé de son vrai titre, en direction d'enfants en jogging aux tempes et au crâne rasés avec juste une mèche qui leur lèche l'oeil, et qui répondent eux-mêmes à des noms prétendûment importés du fin fond de la Bretagne ou de l'Irlande ou franchement calqués sur des modèles d'automobiles, du type Gwendolin ou Twingy, et souvent un chien à poil long avec une mèche qui lui lèche l'oeil, et un puîné à casquette logotypée qui disperse en marchant des papillotes de caramels.Christian Oster. Le pique-nique.*
-Je voulais partir ces jours-ci, dit Angelo. -Pour aller où ? dit Pauline. -Entreprendre, dit Angelo. On a besoin de chercher. -Ceci ne vous suffit pas ? dit Pauline. -C'est exactement ceci que je cherche, dit Angelo. Si j'étais assuré que cet état de bonheur puisse durer ? -Il n'y a aucune raison qu'il ne dure pas, dit Pauline, ceci ne dépend que de nous. -Croyez-vous que nous y soyons pour quelque chose ? dit Angelo. -Croyez-vous que ce soir soit tellement différent de ce qu'il était hier soir ? dit Pauline. -Je sais, dit Angelo, que le monde n'est jamais différent de ce qu'on le fait.Jean Giono. Angelo.
Ce qui n'empêche pas Peter Handke d'avoir une force que j'admire : la capacité d'être seul et d'en faire quelque chose -ne pas se laisser aller à plaire à l'opinion publique, ne suivre la piste que de ce qui compte pour soi, avoir la force de retomber sur soi, et par cela, être signifiant pour les autres. Au dernier moment, j'ai mis dans mes bagages quelques essais de sa main. -Essai sur la journée réussie, Après-midi d'un écrivain, Essai sur le juke-box- Je n'ai pas pris ces livres pour les relire, mais pour me souvenir qu'ils existent. Ils sont là, silencieux et fermés, irradiants, et me rappellent que continuer a une signification, et qu'il ne faut faire que ce que l'on pense être bon pour garder sa paix intérieure et son sens de l'équilibre -ce fantôme moral fragile qui erre dans les pensées.Stefan Hertmans. Entre villes.
-Vous rêvez souvent ? demanda Judith.-Nous ne rêvons presque plus, dit John Ford. Et, si oui, alors nous oublions. Nous parlons de tout, aussi ne reste-t-il rien pour les rêves.Peter Handke. La courte lettre pour un long adieu.
Voisines de palier dans notre tête, elles peuvent ne jamais se rencontrer, jusqu'au jour où elles se croisent dans l'escalier et nous font vivre ce qui ressemble à une révélation.
La bibliothécaire expliquait les avantages de la classification décimale de Dewey à son assistante -avantages qui s'étendaient à tous les domaines de la vie. Elle permettait à chaque chose de trouver sa place, comme l'univers. Elle répondait aux exigences de la logique. Elle était fiable. Y recourir offrait un sentiment d'élévation morale ainsi qu'un grand contrôle de notre chaos personnel."Au moindre souci, a confié la bibliothécaire, je pense à la classification Dewey.-Et qu'est-ce que ça fait ? a demandé l'assistante plutôt impressionnée.-Je m'aperçois que mon problème a simplement été mal classé. On en revient évidemment à ce qu'expliquait Jung -que les conteurs de notre inconscient en plein chaos luttent pour trouver leur place dans l'index de la conscience.-Qui est Jung ?-Il est trop tôt pour vous parler de lui."Jeanette Winterson. Pourquoi être heureux quand on peut être normal ?
Je portais sur les objets les plus simples, par exemple des feuilles, un regard comme amoureux, non, pas vraiment, mais je leur vouais une très bienfaisante attention.Je voyais un chat et je songeais à une cage d'escalier pourvue d'un écriteau "Prière de s'essuyer les pieds".Rober Walser. Le territoire du crayon.
En pur Anglais, Brandon a dit que les Américains étaient paranos. Mais en France alors. On n'a pas besoin d'avoir des armes à la maison, nous. On se méfie en permanence de tout le monde.Nous savons nous méfier aussi bien que râler, ce qui n'empêche pas la bonne cuisine.Jean-Pierre Ostende. Et voraces ils couraient dans la nuit.
De l'individuation des personnages des rêves (les miens)personnages :-physiquement individués mais anonymes (identification par association)-physiquement neutres mais nommés et aussi eux-mêmes-neutres physiquement, nommés, et pas eux (ie dépourvus de leur personne)-narrateur/rêveur parfois dédoublé dans le temps et aussi déplacé/reconnu dans un autre personnage du rêve : c'est moi ! (souvent une jeune femme dans une cabine téléphonique).Alix Cléo Roubaud. Journal 1979-1983
Le vent souffla en provenance de je ne sais où, soulevant les feuilles à demi écloses, si bien qu'une sorte d'éclairs gris argent traversa les airs. Nous étions entre chien et loup. C'était l'instant entre chien et loup où les couleurs s'exaspèrent, où les violets et les ors enflamment, comme les battements d'un coeur impressionnable, les carreaux des fenêtres. C'était le moment où la beauté du monde, éclatante mais prête à périr montre ses deux visages : visage riant et visage d'angoisse, qui partagent également notre coeur.
Virginia Woolf. Une chambre à soi.
Il y aurait un embrassement, on prend dans ses bras l'autre avec qui l'on dansait. L'autre, qui maintenant serait dans les bras, enlacé, sans rien laisser. Etreinte simple et évidente.Il y aurait un baiser.Emmanuel Régniez. L'abc du gothique.
J'avais des carnets de trois couleurs. Les BLEUS, soigneusement alignés contre le mur sud de ma chambre, étaient réservés aux "schémas de gens en train de faire des choses", à la différence des VERTS, sur le mur est, qui contenaient des croquis zoologiques, géologiques et topographiques, et des ROUGES, sur le mur ouest, que je remplissais de dessins d'insectes.*Reif Larsen. L'extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet.
ConclusionsJe tiens surtout à souligner le fait que j'ai trouvé dans la rue plusieurs échos de mon rêve du 30 avril, qui s'affirme comme un "grand" rêve, d'importance majeure pour ma vie éveillée.Petr Kràl. Enquête sur des lieux.
Je ne veux ni ne peux vivre de cette façon, c'est-à-dire que ma vie se réduise à cela; pareille situation n'est pas tenable et je ne suis prête en aucune façon à ce que mon avenir immédiat prenne la forme de six mois de désert, de vide et de ténèbres complets, dans le seul espoir de revoir Denys à l'automne et de connaître alors le même bonheur sans réserve, puis de me trouver ensuite rejetée dans les ténèbres et dans le désert -et ainsi de suite jusqu'à la fin de mes jours.Je sais bien que tu m'as dit qu'il valait la peine d'être totalement malheureux pendant un certain temps pour pouvoir ensuite être totalement heureux pendant une autre période. D'un point de vue strictement mathématique, il est possible que l'on puisse atteindre un état de parfait équilibre, par exemple, en restant pendant six heures dans un bain parfumé à écouter la musique la plus suave qui soit pour ensuite être soumis à la torture pendant les six suivantes (et ainsi de suite); mais dans la pratique, il est tout simplement impossible de vivre de la sorte parce que l'on ne peut se couper aussi radicalement que cela de son passé et de son avenir.(...) Non, pour que je puisse vivre, de façon générale, et que je puisse connaître, et désirer continuer à connaître dans ma vie ce bonheur indescriptible qu'est mon amour pour Denys, il faut, vois-tu que je sois moi-même, que je sois quelque chose à moi seule, que j'aie, que je possède quelque chose qui soit vraiment à moi, que je fasse quelque chose qui exprime ma personnalité.Karen Blixen. Lettre à Thomas Dinesen, le 3/4/26
Habiter n'est pas uniquement manger, dormir, lire le journal, j'ai dit. Un domicile est avant tout un refuge. Il doit protéger du mauvais temps, du soleil, des gens hostiles et des animaux sauvages.*
Je suis allé visiter tout ce qu'on me proposait sans parvenir à me décider. Avec le temps, ça m'amusait d'aller aussi visiter des appartements qui n'entraient de toute façon pas en ligne de compte pour moi. Certains des appartements étaient encore habités et c'était fascinant de voir les différents aménagements imaginés par les gens et combien certains objets les trahissaient. C'était toujours un peu gênant d'être guidé dans la visite par les locataires précédents, de jeter un coup d'oeil dans les placards bourrés de vieilleries, de découvrir des cuisines avec de la vaisselle sale et des restes de repas dans l'évier ou des herbes séchées sur le rebord de la fenêtre.*Peter Stamm. Sept ans.